L’accélération de la pandémie dans le monde et le décès de milliers des gens par jour suite à des contaminations ont provoqué beaucoup de conséquences et de répercussions. Ces derniers ont affecté nos conditions de vie : télétravail, cours à distance, restrictions des déplacements, interdictions de voyage, fermeture de tous les établissements non-essentiels… Ainsi, toutes les activités humaines ont été ralenties ce qui a engendré un grand impact sur les activités économiques, touristiques et culturelles…
Le théâtre ; un secteur frappé de grand fouet :
Au Liban, le secteur du théâtre est un des secteurs les plus touchés et qui a eu une grande difficulté et une grande perte de chiffre d’affaires puisque toutes ses activités ont été interrompues durant les plusieurs phases de confinement. Ces pertes économiques vont affecter la pérennité de beaucoup des entreprises du spectacle et vont remettre en question l’avenir inquiet et incertain des comédiens, des metteurs en scène et des techniciens qui sont à l’arrêt pendant presque deux ans…
Tous les théâtres ont été fermés et les spectacles programmés ont été annulés ou repoussés pour une date inconnue. Et malheureusement le gouvernement libanais n'a pris aucune mesure pour aider les employés dans ce secteur. Le fait qu’il n’y aucune date promise de réouverture jusqu’à présent par l’état à augmenter l’inquiétude et la lassitude des employés dans ce domaine ; ces deux sentiments angoissants viennent de s’ajouter au contexte très difficile et épuisant de la crise.
Les employés dans ce secteur ont été choqués et révoltés quand ils ont appris que le gouvernement a ouvert les restaurants et a laissé les salles de théâtre fermées sachant que le théâtre est un lieu plus propice pour organiser une distanciation sociale.
En outre, l’absence des aides financières par le gouvernement a obligé les comédiens, les associations et les entreprises de théâtre à se réinventer et à se relancer malgré le manque de perspective et l’absentéisme complet de l'État.
Les travailleurs dans le secteur théâtral ont décidé d’investir ce temps libre pour leurs vies professionnelles et d’essayer de proposer leurs spectacles d’une autre façon notamment par le biais d’Internet et via les réseaux sociaux.
En effet, la nécessité vitale de trouver un moyen pour survivre et pour éviter la faillite va permettre aux créateurs ce domaine de trouver et de créer de nouvelles formes. Ainsi, les représentations numériques vont être une des seules solutions qui va les aider à surmonter ces obstacles.
Mais, pratiquer son art malgré tout ce qui se passe est une tâche très difficile et qui nécessite de grands efforts surtout car le public libanais n’est pas très habitué à regarder des spectacles ‘‘payants’’ sur Internet.
Comment réinventer son propre métier, créer des spectacles numériques à domicile et promouvoir cette nouvelle culture complètement numérique ?
L’association « Tiro pour les Arts » a organisé des ateliers d’écriture de scénario à distance pour les jeunes. En outre, un grand nombre de troupes de théâtre libanais ont organisé une série de séminaires sur Zoom avec de nombreux artistes et responsables d’institutions culturelles. Dans ces sessions numériques, ils ont abordé la réalité de l’art et du théâtre durant la pandémie. Le fondateur du Théâtre national libanais, Kassem Istanbouli, déclare lors d’une réunion Zoom que :
« Nous devons rechercher de nouvelles voies et idées afin de faire face à la crise mondiale et à ce qui pourrait en résulter à l’avenir. »
Aussi, le 27 mars dernier, lors de la journée internationale du théâtre, de nombreux associations et entreprises de théâtres ont créé un évènement artistique en ligne afin de parler, de discuter et de proposer des réflexions sur le sens du théâtre, ses nouvelles formes et l’identité de son public, à la lumière de l’influence des performances virtuelles au détriment du spectacle vivant.
Cette crise sanitaire qui a frappé le secteur du théâtre a ouvert un espace pour les discussions et le partage d’expérience qui vont aider les artistes à acquérir des connaissances et à améliorer leurs compétences.
Ensuite, plusieurs spectacles ont été mis en ligne et une bonne partie du public pense que les expériences virtuelles imposées par l’épidémie ont réduit le théâtre à des éléments uniquement visuels et acoustiques. Ainsi on comprend que les spectacles visuels n’ont pas été appréciés par tout le public libanais.
La réalisatrice et l’actrice libanaise Aida Sabra affirme que :
« il y a un pouvoir que le dramaturge tire sur scène, du spectateur qui regarde directement à travers ses yeux et qui entend ses grognements ou son silence… qui entend ses soupirs et ses rires. Mais malheureusement, nous n’avons pas pu toucher ou voir la réaction de ceux qui suivent nos spectacles en ligne, bien que les commentaires écrits en marge étaient tous positifs, mais ils n’ont pas rempli l’interaction humaine et artistique. »
Elle ajoute aussi que les expériences virtuelles que nous suivons aujourd’hui à travers les plates-formes sont immatures et sont toujours à l’étude car la scène théâtrale est affaiblie et ne capture pas tous les détails du visage et du corps, ni l’esprit de dialogue qui s’installe entre les personnages sur scène.
Ainsi, cette nouvelle forme n’a pas seulement été appréciée par un grand nombre de spectateurs mais aussi par plusieurs artistes qui ont affirmé que rien ne vaut de regarder dans les yeux d’un public et d’interagir directement avec lui sur scène. Mais pour l’instant les artistes n’ont pas d’autres choix et il doivent faire et vivre avec en espérant qu’après le retrait du coronavirus, le public aura soif de nouveau des spectacles en direct.
Une situation dramatique et particulière au Liban :
En fait, les artistes libanais étaient non seulement troublés et bouleversés à cause de la situation sanitaire du pays mais aussi à cause de l’explosion du 4 août 2020 sur le port de Beyrouth qui est considérée comme la deuxième plus grande explosion dans le monde après Hiroshima. L’explosion a dévasté la capitale libanaise à cause de la présence d’une matière explosive mal stockée dans les entrepôts du port.
Effectivement, ce drame a affecté la productivité des artistes. Ces derniers se sont sentis incapables de créer de l’art pendant que leur pays traverse un des moments les plus dramatiques de son histoire ; tous les libanais été dominés par le choc, la révolte et la tristesse car jusqu’à présent il n’y a pas beaucoup d’information sur la vérité et ils ne savent pas qui sont les responsables d’avoir stocker une matière dangereuse qu’est le nitrate d’ammonium sur un port qui se situe à côtés des bâtiments, des écoles et des entreprises...
L’artiste Sahar Assaf qui est également professeur de théâtre à l’université américaine de Beyrouth affirme :
« Le théâtre est généralement actif pendant les crises, en particulier au Liban, car l’artiste n’a pas d’autre arme pour s’exprimer et exprimer ses idées que la scène… Mais lors de l’épidémie, qui s’est accompagnée d’une crise économique et d’une énorme explosion, les dramaturges libanais se sont sentis paralysés et corrompus de l’intérieur. »
En définitif, malgré tout ce qui se passe, avoir recours au numérique et combiner cinématographie et théâtre, n’est rien d’autre qu’une tentative de poursuivre la relation et le contact avec le public et de combler cette distance qui nous sépare en tant qu’être humain. En espérant de se retrouver tous très prochainement sur les sièges des salles de théâtre.
Malak Fathallah.
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